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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/74

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CXXVIII

Et l’archevêque commence la bataille.
Il monte un cheval qu’il enleva à Grossaille
(C’est un roi qu’il tua en Danemark).
Le destrier est agile et rapide.
Il a les pieds déliés, les jambes plates,
La cuisse courte, et la croupe large,
Les flancs longs, et l’échine haute,
La queue blanche, et la crinière jaune,
L’oreille petite et toute la tête fauve.
Pas de bête qui puisse lui être comparée !
L’archevêque lui donne courageusement de l’éperon,
Il ne manquera pas d’assaillir Abîme.
Il va le frapper sur son admirable écu
Incrusté de pierres, d’améthystes, de topazes.
De cristaux et d’escarboucles qui flamboient.
C’est un présent de l’émir Galafre
Auquel un diable le donna, au Val-Métas.
Turpin le frappe, sans l’épargner.
Après ce coup, l’écu ne vaut pas un denier.
Il tranche le corps d’Abîme de part en part,
Et l’abat mort sur une large place.
Les Français disent : « Voilà un grand courage,
La crosse de l’archevêque est en sûreté dans ses mains ! »


CXXIX

Le comte Roland interpelle Olivier :
« Sire compagnon, vous êtes bien de mon avis.
L’archevêque est un très bon chevalier,
Il n’en est pas de meilleur sous le ciel,
Il sait bien frapper de la lance et de l’épieu, »
Le Comte répond : « Allons donc lui aider ! »
À ce mot, les Français recommencent.
Les coups sont durs, et rude est la mêlée.
Les chrétiens y subissent une grande douleur.