Aller au contenu

Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/73

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ô Grande Terre, puisse Mahomet te maudire !
Par-dessus toute nation, la tienne est hardie. »
Pas un des Sarrasins qui ne crie : « Marsile,
Chevauche, ô Roi, nous avons besoin d’aide. »


CXXVI

La bataille est merveilleuse et étendue ;
Les Français y frappent de leurs lances au fer bruni ;
Vous pourriez y voir beaucoup d’hommes souffrir,
Beaucoup de morts, de blessés tout sanglants :
L’un gît sur l’autre : l’un sur le dos, l’autre face à terre.
Les Sarrasins ne peuvent tenir plus longtemps ;
Bon gré, mal gré, ils abandonnent le terrain.
Les Français les poursuivent avec ardeur.


CXXVII

Marsile voit le massacre de son peuple
Il fait sonner ses cors et ses buccins.
Puis il chevauche avec sa grande armée.
Devant s’avance un Sarrasin : Abîme ;
Il n’en est pas, dans tout son entourage, de plus félon,
Il est souillé de crimes et de grandes félonies.
Il ne croit pas en Dieu, fils de sainte Marie.
Il est noir comme de la poix fondue.
Il préfère la trahison et la tromperie
À tout l’or de la Galice.
Jamais aucun homme ne l’a vu jouer ou rire.
Mais il est d’une bravoure qui frise la folie.
C’est pourquoi il est cher au traître Roi Marsile.
Il porte un dragon, comme signe de ralliement.
Mais l’archevêque ne saurait l’aimer.
Dès qu’il l’aperçoit, il brûle de le frapper
Et, tranquillement, se dit en lui-même :
« Ce Sarrasin me semble bien hérétique.
Jamais je n’aimai ni couards, ni couardise.
Mieux vaudrait mourir que de ne pas l’aller tuer, »