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mars, merseries, notamment d’excellentes pommes de terre, trumfes, patates, les fourrages. Dans la plus grande partie de l’Andorre, les plantations de tabac occupent les meilleurs fonds : on devine d’où vient leur succès. Des lieux-dits portent sur divers points le nom de canemar, chènevière ; mais on ne cultive plus guère le chanvre. Une autre culture qui a disparu est celle de la vigne : tels actes du xve siècle mentionnent des vignes entourées de tous côtés par d’autres vignes[1]; aujourd’hui, les Andorrans font venir du pays d’Urgel leur provision de vin. Ce vin épais, transporté dans des peaux de bouc, donne du bon rancio, vi ranci. On le traite à peu près comme nous faisons le vinaigre : on ajoute au baril, à mesure qu’il se vide, et le rancio agissant sur ce vin nouveau le fait Jaunir et rancir rapidement. Les vins qui fournissaient le meilleur rancio provenaient del Priorat, au-dessous de Reus, en Catalogne. Le vi ranci est le champagne de l’Andorre : il figure à la fin de tous les repas soignés ; dans les banquets officiels, c’est au rancio que l’on prononce les toasts, en cette langue souveraine qu’est la catalane, impérieuse et sonore comme un choc d’épée.

L’élevage. — La principale industrie agricole des Vallées est l’élevage des troupeaux : troupeaux indigènes, mulets ou matxos achetés en Poitou, bétail loué à cheptel, troupeaux étrangers pour lesquels les pacages sont pris à ferme, tout cela vit, durant l’été, sur les montagnes semées d’abris et de baraques, pardines, orris, et les sonnailles de ces innombrables troupeaux, ramats ou colles, mettent un peu de vie dans la solitude des pâturages immenses.

Les paroisses qui ont des ressources budgétaires rendraient à l’Andorre un service signalé en s’occupant de perfectionner l’industrie pastorale, d’améliorer les races, d’utiliser plus rationnellement le lait. Les fromages andorrans sont franchement mauvais ; les races ovine et bovine

  1. 24 avril 1468. Vente d’une vigne dans la paroisse d’Andorre : les trois immeubles cités comme confrontations sont des vignes. — Un bail à ferme d’une exploitation rurale dans la paroisse d’Andorre, en date du 25 juin 1444, fait mention de mûriers : le preneur pourra « sindere omnes arbores sechs et staxar tots moreys ».