Aller au contenu

Page:La coutume d'Andorre.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec la France sous prétexte de mesures sanitaires[1] ; la suspension des échanges ou simplement des immunités douanières à la frontière espagnole est l’un des moyens de contrainte les plus puissants dont il soit possible d’user contre les Vallées.

La communauté de langue avec les provinces espagnoles voisines[2], la soumission, dans l’ordre religieux, à un évêque espagnol, sont autant de circonstances qu’il ne faut pas perdre de vue quand on étudie comment s’est élaborée la personnalité de l’Andorre, comment se sont formés ses mœurs et son droit.

C’est donc vers le Sud, avec la Séo d’Urgel principalement, que l’Andorre a noué le plus de relations ; malgré le rétablissement des droits de douane à la frontière espagnole, le commerce se fait surtout de ce côté ; les familles notables se mêlent par des mariages assez fréquents aux familles espagnoles, plus rarement aux familles françaises ; leurs enfants se font une situation en Espagne plus qu’en France. Des détachements de la musique militaire de la Séo viennent en Andorre pour les fêtes locales, en uniforme, commandés par un chef. Plus que toute autre ville, Barcelone attire les Andorrans pour leurs affaires ou leurs plaisirs. Dans le hameau le plus rapproché de la frontière française, j’ai eu la curiosité de demander à une jeune femme d’une maison aisée si elle avait voyagé : elle avait visité Barcelone, elle n’avait pas vu la France, qui est beaucoup plus près et d’un accès incomparablement plus facile. Les Juges des appellations français se faisaient suppléer jadis, paraît-il, par des juristes espagnols[3] ; aujourd’hui encore, les hommes d’affaires de la Séo conseillent les bayles, même le bayle français, quand les bayles sont dans l’embarras. C’est à la Séo que les Syndics se sont

  1. Le Politar s’occupe de la question dans une de ses maximes.
  2. C’est aussi, soit dit en passant, une justification du rattachement de l’Andorre aux Pyrénées-Orientales. Je suis absolument désintéressé dans la question ; on me permettra donc de faire observer qu’il serait difficile de constituer en France, en dehors de Perpignan, un tribunal jugeant sur pièces en catalan et écoutant des plaidoiries catalanes sur des points de droit catalan.
  3. Politar, p. 186.