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LA DOMINATION

ces soumissions, ces révoltes que j’ai surpris dans ses yeux ; elle aimera ainsi jusqu’au jour où c’est elle qui sera l’aînée, où c’est elle qui tiendra les mains de l’autre, elle qui sera courageuse et grave, elle qui rêvera et qui donnera ; debout près du jeune homme alangui, le couvrant de sa belle ombre amoureuse, elle dira : « Tu es la vie, ô mon amour, tu es la jeunesse et l’azur, le parfum des vertes amandes ! »

Mais voici qu’un feu l’exalte, que l’antique puissance d’Éros l’étreint, le vainc, le convainc. Hélas ! ne le sait-il pas, lui-même, qu’honore-t-il, qu’a-t-il jamais honoré qui ne soit le désir ? Désir, vertige profond, vacillement des regards, divin strabisme de l’âme ! Ne lui a-t-il pas dédié tous ses livres ? N’honorait-il pas la seule puissance du monde, le désir, quand dans le génie ne reconnaissant que la fièvre il s’écriait : « Hugo ! Shakespeare ! inépuisables et ma-