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l’impuissance et la désolation aggravée de la femme devant l’absence de l’amant. Or, le livre d’Eugénie Grandet restitue, fixé davantage et mieux nourri, un développement identique.

Les noms aussi reviennent. Le lecteur croise un duc Horace de Landon-Taxis. Chacun ne se souvient-il pas de Bianchon ? Ou tout au moins chacun doit se rappeler la marquise de Listomère, tante des Victor d’Aiglemont de la Femme de trente ans. Horace et Landon complètent leur désignation réciproque.

Enfin le cadre de la scène change peu. Les campagnes de l’Ile-Adam et de la Touraine se déroulent. Elles prêteront par la suite leurs ombrages au marquis d’Albon et au colonel Philippe de Sucy d’Adieu : au président de Grandville et à Caroline Crochard d’Une double famille ; aux Brandon et aux Gaston de la Grenadière ; aux Aiglemont de la Femme de trente ans ; aux Mortsauf et au Vaudenesse du Lys dans la vallée. Sèvres et Ville-d’Avray se détachent, et ils deviendront les nids fort différents des Macumer-Gaston de Mémoires de deux jeunes mariées et des Vervelle-Grossou de Pierre Grassou. Le Marais et la Bastille se profilent. Facino-Cane ; les Clapart-Husson du Début dans la vie ; les Grandville et les Crochard d’Une double famille ; les Bauvan, Hostal et Loraux d’Honorine ; les Saillard, Baudoyer, Transon et Bataille des Employés ; les Magus, Fraisier, Poulain, Cibot, Pons et Schmucke du Cousin Pons, hanteront et habiteront successivement ce coin parisien endormi. Sites et quartiers familiers à l’existence de leur annaliste.

Certaines figures se reconnaissent, ébauchées : un Guérard, de qui tiendront Chesnel du Cabinet des antiques, Niseron des Paysans, Mathias du Contrat de mariage, Michu d’Une ténébreuse affaire. Madame Évangélisla du Contrat de mariage et la présidente Camusot de Marville du Cousin Pons emprunteront des traits de leurs physionomies respectives à une madame d’Arneuse.

Les personnages correspondent, et leurs missives ont encore et déjà cette vie propre, particulière à l’œuvre admirable qu’ouvrent les Chouans et ferment les Parents pauvres. L’ « odor della femina », que respirait Gautier, y circule.

Noire confrontation, nos comparaisons et notre contrôle visent uniquement le conte de Jeanne la Pâle et ne répondent nullement de ceux qui l’escortent, le précèdent ou le suivent.

Nos commentaires, en outre, prodiguent les réserves.

Les combinaisons et l’ensemble de l’agencement appartiennent au mélodrame.

Le style ne laisse point deviner la langue prodigieuse obtenue postérieurement, pleine de suc ; forme grossie d’un fond léonin ; cavalier merveilleux dirigeant l’idée, fougueux et robuste cheval ! Les partisans et les champions de la phrase coulante ou châtiée pourraient préférer