Page:La libre revue littéraire et artistique, 1883.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nids, les chants d’amour, les fêtes de l’embruyérage, du décoconnage, et votre ombre si doucement découpée de soleil !

Adieu, cigales harmonieuses, adieu les idylles sur les échelles, adieu la poétique cueillette, adieu amours, chansons adieu !

Grimpés sur les luxuriants arbres, ils reprirent donc leur travail, et, par de doux propos et de tendres regards, leurs amours ébauchées l’antan.

Ils chantèrent, mais ils ne furent pas seuls à chanter : — par les champs embaumés, dans les trèfles roses, dans les sainfoins rosissants, dans les cerisiers rouges de leurs fruits, sous le dôme sombre des noyers, dans les blés ondoyants à grandes vagues sous les souffles de la brise : trissaient les ortolans, caccabaient les cailles, fredonnaient les fauvettes, bouboulait la huppe, tireliraient les lulus, roucoulaient les tourterelles, mouettait le bouc, blatéraient les béliers, bêlaient les frêles agneaux, plausitaient les colombes ; — et les traquets, posés au sommet des échalas, à la pointe des vergelles, faisant entendre leurs vifs ouis-tra-tra-tra ! célébraient à leur manière le soleil, le grand air et les vastes horizons.

Dans la chanson de Perlette, rappelant ces églogues où des bergers de Sicile disputent en distiques alternés, il n’était jamais parlé que des filles du village voisin. Celles du village de Perlette étaient, disait la chanson, toutes faites au tour, possédant toutes les vertus — et vierges.

Celles de la commune voisine étaient toutes, tant grandes que petites, des chiffons que personne ne demandait en mariage.

Métalli, entendant ces piquantes sorties, riait aux éclats. Alors Perlette chantait la réplique des filles du village ainsi blasonné, contre celles du sien. Pour le coup, c’étaient elles qui étaient des catins, s’il fallait en croire la chanson.

Et Métalli de rire encore !

Quand elle eut fini le dernier couplet, il lui demanda pourquoi on se chansonnait ainsi chez elle. Alors, mise dans la voie des souvenances de son pays, elle ne tarit plus sur les coutumes de ses montagnes, sur les fêtes de son village, les danses au cabaret, les bourrées où les uns touchent l’air de danse et les autres se trémoussent en mesure, au son de leurs sabots ; les copieuses buveries, les ivresses du vin et de l’amour, les jalousies, les querelles entre gars, les rixes à coups de poings : puis les couteaux tirés pour les belles ; les belles comme les Sabines, se jetant entre les combattants ; enfin l’arrivée de la maréchaussée arrêtant quelques-uns des plus chauds, ce qui calmait les autres… jusqu’au dimanche suivant.

Métalli, à l’écouter, prenait un plaisir extrême.

Mais ce qui le charmait surtout, c’était de l’entendre siffler. Elle avait