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l’ondée de la nuit a légèrement mouillé la terre, partir pour les bois fumants de rosée, s’enfoncer dans la futaie que traverse obliquement la vermeille illumination du matin ; là, dans un silence profond, à peine troublé par un gazouillis de mésanges ou un grignotement d’écureuils, quêter avec le flair d’un chien truffier et le respect d’un gourmand les nombreuses variétés de bolets et d’agarics. Y a-t-il beaucoup de plaisirs plus innocents et aussi vifs ? »

Les dessins, de Delbos, dont le roman est accompagné, en ont bien traduit la pénétrante saveur rustique.

Si des rééditions nous passons aux œuvres nouvelles, nous nous trouvons en présence d’un des survivants de la grande génération de conteurs qui a pour trinité Alexandre Dumas, Eugène Sue et Frédéric Soulié.

Petit-neveu de l’académicien de ce nom, M. Honoré de Bourzeïs est un vétéran de la littérature dont les états de service relatent de brillantes campagnes. Lauréat de la Société des gens de lettres à vingt ans, il a publié depuis au Figaro, à la Pairie, au Pays, au Constitutionnel, une longue série de romans qui, chose rare, ont retrouvé plus tard en volume le succès du feuilleton. Tout comme Féval, Soulié et Gaboriau, M. de Bourzeïs empoigne le lecteur dans un roman d’aventure, mais bien mieux qu’eux il sait fouiller la nouvelle d’analyse. Perrine, le Père Labichonne, l’Esprit des bêtes sont à notre avis de délicates études dignes de Topffer pour l’humour, et de Ch. Lamb, Hildebrand et Conscience pour la sincérité de l’observation.

La maison Blériot et Gauthier nous a fait remettre deux nouveaux romans de M. Honoré de Bourzeïs : les Deux Pères et l’Orpheline des Ardoisières.

Les deux pères, M. de la Cerizaie, le gentilhomme, et maître Mirand, l’intendant, rêvent, l’un pour son fils, l’autre pour sa fille, une riche et brillante alliance. Mirand est une intéressante variété de coquin honnête homme, qui cherche à résoudre le double problème de doter sa fille en volant son maître et de restituer en la faisant épouser au fils de celui-ci. Mais la fille, qui ne l’entend pas de cette oreille, déjoue ce calcul ingénieux et fait restituer nuitamment par une servante dévouée la somme dérobée, ci 160 000 fr. Prise pour une voleuse, la malheureuse servante est tuée dans l’accomplissement de cet acte. À partir de cet épisode, le roman se transforme en un drame judiciaire très vigoureusement noué. Nous suspendons ici notre analyse, afin de laisser au lecteur tout l’intérêt des péripéties et du dénouement.

La librairie Hachette nous envoie trois romans anglais. Ce sont Vixen, de miss Braddon ; Madeline, de Virginia Townsend, et Mildred, de mistress Craik, charmantes œuvres de femmes élégamment