rielles pour nos vieux jours. C’est la richesse morale qu’il faut acquérir quand
on est jeune, pour en jouir quand on est vieux. Enrichissez votre âme, afin
qu’elle ait de quoi se soutenir dans les mauvais jours. « Voyez, dit S. Augustin,
la fourmi de Dieu : elle se lève tous les jours de grand matin, court à l’église,
prie, entend la lecture de la parole sainte, chante les hymnes, repasse dans
son esprit ce qu’elle a entendu, y réfléchit longtemps et amasse le grain
qu’elle a recueilli dans l’aire… Vient l’épreuve de la tribulation, l’hiver de la
vie, l’orage de la crainte, le froid de la tristesse, la perte des biens, le risque
de la vie, la mort des siens, la disgrâce et l’humiliation… Alors les hommes
regardent cette âme fidèle avec une grande compassion : Quel malheur !
disent-ils ; le moyen de vivre après cela ? Comment cette personne est-elle
point accablée par tant de maux ? — Ils ne savent pas les provision qu’a
faites la fourmi et qui la nourrissent à ce moment ; ils ne voient pas quels
grains précieux elle a amassés, et comment, renfermée dans son abri, loin
de tous les yeux, elle se soutient pendant l’hiver à l’aide des travaux de
l’été. » Voilà comment S. Augustin explique l’éloge que Salomon fait de la
prévoyance de la fourmi, prévoyance d’autant plus louable qu’elle s’applique
à des biens plus élevés et plus solides que ceux que recherchent ordinairement
les hommes, biens qu’on ne possède et dont on ne jouit dans la vieillesse qu’à
la condition de les avoir acquis dans la jeunesse. Ne nous y trompons pas,
en effet, notre jeunesse fait et prépare notre vieillesse [et même notre vie éternelle],
et nous ne retrouvons dans nos greniers que ce que nous avons semé et
cultivé dans nos champs pendant le printemps. »
Les Proverbes sont le premier des livres appelés sapientiaux, dans le sens strict, parce qu’ils nous enseignent la véritable sagesse, celle qui nous apprend à pratiquer la vertu, à devenir meilleurs et à faire, comme nous le disons aujourd’hui dans la langue chrétienne, notre salut. La sagesse est, par conséquent, la même chose que la vertu ; elle consiste à connaître et à faire le bien pour plaire à Dieu, iii, 4 ; à fuir le mal pour ne point lui déplaire, iii, 7 ; cf. viii, 13 ; à agir, en un mot, d’une manière surnaturelle. Le sentier des justes est lumière ; la voie des méchants, ténèbres, iv, 18-19. Cf. xxviii, 18 ; iv, 27, Salomon veut prêcher ainsi la sagesse à ceux qui ne la connaissent pas encore, et en donner une connaissance plus parfaite à ceux qui savent déjà ce qu’elle est. A cause du but qu’il se propose, il s’adresse à l’homme en général ; l’individu s’efface devant l’humanité ou se confond avec elle. Le Juif ne se montre pas ici ; le côté étroit et national qui dépare les productions rabbiniques est tout à fait absent des livres sapientiaux ; l’Esprit Saint instruit tous les hommes, parce qu’il les appelle tous au salut. La sagesse à laquelle il les convie, qu’il veut leur faire aimer, n’est pas du reste une abstraction ; c’est une personne divine. L’auteur sacré nous la représente, dans le ch. viii, 14, revêtue des attributs qu’Isaïe donne au Messie, xi, 2, le conseil, l’intelligence, la force ; il nous parle d’elle, 15-16, comme de Dieu : toute puissance vient d’elle sur la terre ; elle aime ceux qui l’aiment ; elle est la source de tous les biens, 16-21. La Sagesse est le Verbe, la seconde personne de la Sainte Trinité, engendrée de toute éternité par le Père, 22-23. Elle est désignée comme le Verbe dans l’Apocalypse, iii, 14 ; comme Jésus-Christ dans S. Paul, Col., i, 15 ; elle a pris part à la création du monde, 24-30, comme nous l’explique S. Jean au commencement de son Évangile, i, 3 ; elle n’est pas seulement spectatrice de la création, elle y