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LOUISE LABÉ


se composer. Toute femme qui veut passer pour instruite s’essaye à la correspondance poétique, chante et joue du luth. Ce féminisme de bon aloi est bien une des plus curieuses caractéristiques de notre Renaissance lyonnaise. Dans la préface de ses œuvres parues chez Jean de Tournes avec privilège du Roi en 1555 Louise Labé, s’adressant à son amie Clémence de Bourges, s’exprime ainsi : « Estant le temps venu, Mademoiselle, que les lois des hommes n’empeschent plus les femmes de s’appliquer aus sciences et disciplines : il me semble que celles qui ont la commodité, doivent employer cette honneste liberté que notre sexe ha autre fois tant désirée, à icelles apprendre : et montrer aux hommes le tort qu’ils nous faisoient en nous privant du bien et de l’honneur qui nous en pouvait venir. » Elle ajoute : « L’honneur que la science nous procurera, sera entièrement notre : et ne nous pourra estre oté, ne par finesse de larron, ne force d’ennemis, ne longueur de tems. » Et plus loin : « Ayant passé partie de ma jeunesse à l’exercice de la Musique et ce qui m’a resté de tems l’ayant trouvé court pour la rudesse de mon entendement, et ne pouvant de moymesme satifaire au bon vouloir que je porte à notre sexe, de le voir non en beauté seulement, mais en science et vertu