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LOUISE LABÉ


nelle dispute entre la Folie et l’Amour pour connaître qui des deux doit céder le pas à l’autre, dialogue « traité en prose à une époque où tout n’était que ramage d’oiseaux et d’oisillons éveillés par Ronsard et Du Belay », dit un peu sévèrement M. Boy. Mais ce morceau domine tellement son siècle qu’on ne saurait trop l’apprécier. Le style est ferme, très clair, bien différent de celui des contemporains pétrarquisants, et pour dire le mot, un des chefs d’œuvre de la langue française. Cette œuvre seule prouverait à quel point Louise Labé diffère de Maurice Scève, dont quelques-uns ont voulu qu’elle ait subi l’influence. Rien de plus faux. À cette époque de formation de la langue on reste étonné de l’aisance du style et de la perfection de la forme. La prose de Rabelais peut seule rivaliser avec celle du Débat.

Quant à ses sonnets on a dit justement qu’ils représentaient en miniature un épisode du poème inépuisable de l’amour. Encore qu’il soit puéril de vouloir chercher dans ces vingt-quatre sonnets les débuts, le nœud et le dénouement d’une crise sentimentale, la pensée se poursuit avec méthode et ordre, et ces poèmes ne semblent plus des morceaux détachés, sans suite entre eux, mais « les assises méthodiquement élevées d’un petit temple réservé au culte d’une divinité. »