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fin de roman

La femme dévisagea un moment la fille qui se présentait devant elle.

— Tu me parais bien jeune, déclara-t-elle après un moment.

— J’ai dix-sept ans, déclara Luce.

— Il y a bien de l’ouvrage et il faut être sérieuse ici, ajouta la femme.

— Ben, j’ai dix-sept ans, répéta Luce. J’ai vu votre annonce et je suis venue. Vous n’êtes pas obligée de me prendre.

— Puis, faut avoir de la patience et ne pas avoir peur de travailler.

— Faut ben des qualités pour entrer ici, fit Luce un peu piquée. Faut-il prendre soin d’une folle ou d’un paralytique ?

À ce moment, des éclats de voix provenant d’une pièce à côté arrivèrent jusqu’aux deux femmes.

— Attends un moment, je vais rétablir l’ordre.

Et la patronne ouvrit une porte donnant sur une salle où Luce aperçut quelques vieux jouant aux cartes et se disputant pendant que d’autres groupés autour d’eux fumaient la pipe.

— Voyons, allez-vous finir de vous chicaner ? fit la maîtresse de la maison en s’adressant aux joueurs.

— C’est Casimir qui triche. Il joue ses atouts au lieu de fournir.

— C’est le Boiteux qui est jaloux parce qu’il perd, riposta l’un des hommes.

— Si vous ne pouvez vous accorder, je vais vous enlever les cartes, menaça la femme en sortant de la salle.

— Écoute, je vais te dire ce que c’est, reprit-elle en s’adressant à Luce. C’est ici la maison des Douze pauvres