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fin de roman

injustice qu’il fût ainsi privé de cet argent qu’il avait si bien gagné. Alors, elle lui accordait toute sa sympathie. « Je souhaite sincèrement, » dit-elle, « que cette affaire s’éclaircisse au plus tôt et que vous receviez vos $2,000. »

— Je l’espère, répondit-il, car je commence à trouver le temps long.

Comme la veille, il l’accompagna jusqu’à sa chambre. Tout en causant, il lui souriait et Luce était plongée dans un ravissement qu’elle n’avait jamais connu auparavant. Ah ! ce qu’elle était assoiffée de tendresse cette petite ! Chaque soir, ils se retrouvaient à la table de leur modeste restaurant et ils discouraient longuement tout en mangeant. Luce était infiniment heureuse. Elle buvait les paroles du jeune aviateur, sentait une joie immense la pénétrer lorsqu’il lui souriait. Plus tard, enfermée dans sa chambre, elle se répétait ce qu’il lui avait dit et elle savourait sa joie comme elle eût fait d’un beau fruit.

Ils se connaissaient déjà depuis plus de deux semaines.

— Tu devrais bien m’amener chez toi, demanda-t-il un soir, la tutoyant soudain. Nous pourrions causer en paix, sans importuns.

— C’est si pauvre, dit-elle, malheureuse de ne pas pouvoir le faire entrer dans une belle pièce comme dans la maison de Mme Perron.

— Peut-être, mais tu vis là, c’est là que tu te reposes, que tu penses, que tu rêves et c’est là ce qui m’intéresse et aussi le désir que j’ai de te prendre dans mes bras et de t’embrasser en te disant que je t’aime.

La jeune fille connaissait maintenant la joie d’aimer et d’être aimée.

Le lendemain, il lui parlait de ses embarras. Ce qui l’ennuyait, disait-il, c’est qu’il avait perdu ses papiers au