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fin de roman

Ils avaient été amenés au poste. En regardant la liste des noms des détenus, les policiers avaient immédiatement sorti de leurs dossiers un mandat d’arrestation émis il y avait déjà plusieurs mois pour Mérou accusé d’obtention d’argent sous de fausses représentations. Son procès s’était instruit la veille. La plaignante était une jeune veuve qui avait raconté au juge que Mérou qui avait été son ami, lui avait soutiré, en lui promettant le mariage et en se faisant passer pour aviateur afin de se donner du prestige, de se rendre intéressant, de la conquérir, l’assurance de mille piastres qu’elle avait reçue à la mort de son mari. Après avoir obtenu l’argent, il était disparu. Le journal donnait des détails piquants, savoureux et typiques, qualifiant de faux héros ce garçon qui n’avait pas même été soldat. Mérou avait avoué. La sentence était remise à huitaine.

C’était un vulgaire escroc.

Ainsi, il n’avait jamais été aviateur. Il était marié, avait une femme et un enfant et, avant de la connaître, il avait volé une veuve en lui jouant la comédie de l’amour. Tout ce qu’il disait, était un tissu de mensonges. Elle, Luce, avait été sa plus récente victime. Il lui avait raconté les mêmes histoires qu’à l’autre, des histoires de seconde main, si l’on peut dire, il lui avait fait les mêmes menteuses promesses. Elle était profondément, souverainement écœurée. Ces stupéfiantes et douloureuses informations l’avaient laissée bouleversée, et elle restait sans force, sans courage devant la vie. Son bel amour qui la soulevait, la transportait, la transfigurait à certains moments, qui l’avait rendue si heureuse, qu’elle portait en elle comme un fabuleux trésor, était tombé dans un tas d’immondices. C’était une incroyable profanation. Elle n’avait pas même été trahie, car elle n’avait pas été aimée. Tout sim-