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fin de roman

faire vivre. Le croiriez-vous, je n’ai jamais eu cent dollars devant moi. J’espère que les choses vont s’améliorer mais la clientèle est bien lente à venir.

— Écoutez-moi dis-je, dans un moment d’impulsion irrésistible, si vous tenez à moi, si vous croyez que nous pourrions être heureux ensemble, il y aurait peut-être moyen d’arranger cela. Il me reste encore un peu d’argent de mes assurances et nous pourrions nous installer et vivre modestement en attendant que votre profession rapporte davantage.

— Je n’ai pas dix dollars pour aller chez le bijoutier et acheter une alliance, déclara-t-il dans un geste de découragement. Je n’ai pas d’argent pour payer le mariage, pas d’argent pour le voyage de noces, pas d’argent pour nous installer.

Il paraissait très malheureux.

— Je ne suis pas riche, mais je peux faire ces dépenses, dis-je.

Alors, il se leva, me prit dans ses bras, m’embrassa passionnément, disant : Faites ce qui vous plaira, chérie, et je serai très heureux.

Nous nous épousâmes quinze jours plus tard. J’avais loué un petit appartement, je l’avais meublé modestement. J’avais payé l’alliance, les honoraires du ministre et le voyage de noces.

Ah ! les pauvres femmes affamées d’amour et de tendresse.

Pendant trois ans environ, je fus heureuse. Ah, que ces années m’ont paru brèves, ont passé rapidement. Puis, je constatai un changement dans l’attitude de mon mari à mon égard. Moi, j’étais amoureuse comme aux premiers jours, mais lui était distant, quasi indifférent. Il se pro-