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fin de roman

— Tiens, prends ton fils, dit-elle à mi-voix d’un ton décidé et rageur. Après ce geste aussi soudain qu’inattendu, elle s’éloigna aussi vite qu’elle le pouvait.

Un vrai coup de foudre.

Stupéfait, blême de fureur, le futur marié aussi embarrassé que possible et ne sachant trop que faire, regarda autour de lui comme pour trouver quelqu’un à qui confier le cadeau qu’il venait de recevoir mais ne trouvant personne, se leva et alla le déposer sur un banc. À peine abandonné et ne se sentant plus protégé ni soutenu, l’enfant se mit à pleurer. En entendant ses cris, je fus comme saisie de panique et me levant, je pris ma course vers la porte du temple, laissant là celui qui devait m’épouser et le pasteur ahuri.

— Irene ! Irene ! me criait Vernon Faber d’un ton suppliant, mais rien ni personne n’aurait pu me retenir. Je m’enfuyais comme si j’eusse été menacée par un danger terrible.

Aussitôt en dehors de l’église, je sautai dans un taxi qui attendait et donnant au chauffeur l’adresse de mon appartement : En vitesse, lui dis-je.

Quelques minutes plus tard, nous étions rendus.

— Attendez-moi, dis-je. Je reviens dans un instant.

Après avoir ouvert ma porte, je saisis les deux valises renfermant mon linge et mes toilettes que nous devions venir chercher après le mariage pour partir en voyage. Les valises dans le taxi, je me fis conduire à un petit hôtel où une jeune femme que je connaissais avait déjà demeuré. Je demandai une chambre. Aussitôt entrée, je fermai ma porte à clé et me jetai lourdement sur le lit pour essayer de penser, de réfléchir. En quelques secondes, j’avais brisé mon mariage, complètement changé le mode de