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fin de roman

vieille brute ! Force était au père Dubon de subir sa destinée. Plus tard, les religieuses trouvèrent ce vieux qui était complètement perdu, qui ne pouvait répondre aux questions qu’on lui posait, qui ne se rappelait plus son nom ni d’où il venait. Naturellement, les sœurs firent une enquête, apprirent que cette épave échouée chez elles retirait une pension de vieillesse. Alors, il devint un pensionnaire régulier de la maison. Puis, un peu calmé, son intelligence lui revint au vieux. Mais voilà qu’il tomba malade, bien malade. Les sœurs croyaient qu’il n’en avait pas pour longtemps. Alors, les enfants s’inquiétèrent. Qu’est-ce qu’ils feront lorsqu’il mourra. Car c’est la question de l’argent qui les préoccupe.

— Ben, fit Guillaume, comme il ne nous a jamais rien donné et qu’il n’a pas d’argent, on l’entortillera dans un drap de coton, on lui fera chanter un libera et on le conduira au cimetière.

D’un ton ferme, Onésime déclara : « Moi, je suis parti de la maison à quatorze ans et j’ai toujours gagné ma vie seul. Le père ne s’est jamais occupé de moi ; nous avons vécu indifférents, étrangers l’un à l’autre. Alors, qu’il s’en aille comme il pourra. Faites ce que vous voudrez. Moi je m’en lave les mains. »

Et l’on discute toujours.

— Thérèse qui est la plus riche de la famille devrait s’en occuper et le faire enterrer, suggère Dupras, marié à Louise.

— D’abord, riposte Thérèse impatientée, attendez donc qu’il meure pour prendre les arrangements nécessaires. Puis, on avisera ensuite. Moi, je suis prête à faire ma part. Évidemment, je ne lui achèterai pas un cercueil en bronze, mais je ferai autant que les autres.