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fin de roman

Alors, elle leur acheta quelques jolies toilettes pour leur donner un cachet d’élégance et, au mois de juin, elle et ses quatre filles, quatre grandes blondes minces et maigres, s’installèrent dans une pension fashionable, une pension renommée à Pointe Claire, sur le lac Saint-Louis. Tout de suite, Mme Lafond se mit à l’œuvre. Elle voulait trouver des maris pour ses filles et pour accomplir cette tâche, il lui fallait se démener. Comme nous l’avons dit, elle avait des manières engageantes, réellement plaisantes qui lui gagnaient la sympathie dès qu’on la rencontrait. C’était une courte femme brune, ronde de partout et débordante de santé. Jamais on n’aurait cru qu’elle était la mère de ces grandes et minces filles blondes. Il en était pourtant ainsi. Les filles tenaient de leur père ; elles lui ressemblaient non seulement au physique mais par le caractère. Elles étaient sages, tranquilles, réservées, nullement expansives, tandis que la mère au contraire, était toujours gaie, de bonne humeur, vite familière et n’arrêtait jamais de parler. Cela, c’était bien commode pour l’entreprise qu’elle projetait. Sans tarder, elle se créa des relations, fit des connaissances parmi les dames de la place, leur confia son problème et les pria de lui faire connaître des jeunes gens disponibles si elles en connaissaient. Bien des femmes adorent se mêler à des aventures matrimoniales, aussi plusieurs se mirent-elles immédiatement à la recherche de partis convenables pour les demoiselles Lafond.

Un après-midi que la veuve aux quatre jeunes filles à marier et quelques unes de ses nouvelles connaissances étaient à prendre une limonade sur la véranda de la pension, Mme Langlois, jeune femme de trente ans qui avait réussi à se faire épouser par son ami après une liaison de trois ans, annonça : Je crois bien que j’ai un sujet pour vous, Mme