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COUP DE VENT


Les récoltes étaient terminées et le dernier tombereau de pommes de terre avait été entré ce jour-là dans la cave lorsque Philémon Boyer s’adressant à son père au souper lui annonça : « Ben, je crois que ce serait le bon temps pour moi de me marier ».

Il y avait un an et demi que Philémon fréquentait sérieusement Adèle Lesieur, la fille du forgeron et il avait été entendu entre les deux jeunes gens qu’ils s’épouseraient aussitôt que le père Étienne Boyer se déciderait à donner sa terre à son fils. Les amoureux trouvaient que l’attente avait assez duré.

Le vieux garda un moment le silence. Son fils avait vingt-cinq ans, juste le bon âge pour fonder une famille, puis Adèle possédait de précieuses qualités et elle lui ferait une bonne femme. Souvent dans ces derniers temps, il avait songé à ces choses et il se disait que c’était là la vie. Alors, il déclara : « C’est bon, nous irons demain su l’notaire pour passer les papiers et tu deviendras le maître à la saint Michel. Tu t’engageras cependant à nous faire vivre, ta mère et moi.

— Ben certain, ben certain, acquiesça le fils.

Désormais assuré du bien paternel, Philémon convint avec Adèle qu’ils se marieraient le deuxième samedi d’octobre.

Dans l’attente de ce jour, les deux jeunes gens se trouvaient parfaitement heureux et envisageaient l’avenir avec confiance.

Philémon s’acheta un beau complet avec gilet de fantaisie.

Trois dimanches consécutifs les bans furent publiés au prône.

Chez le forgeron, on se préparait pour le dîner de noces.