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LE DESTIN DES HOMMES

Comme les affaires allaient bien et qu’il s’entendait parfaitement avec son ami Fagan, il vivait de bonnes heures au bureau, mais chez lui, la vie était bien pénible, bien amère.

Ses études terminées, Victor entra chez un opticien pour apprendre le métier. Trois ans plus tard, il quitta Rochester et s’en alla dans le voisinage de Boston où il s’établit à son compte. La séparation du père et du fils fut très froide. Deux ans plus tard, Victor revint toutefois à la maison paternelle pour une courte visite. Il venait de se marier et il voulait présenter sa femme à ses parents.

En vieillissant, l’épouse de Massé devenait encore plus hargneuse et la vie à la maison était quasi intolérable. Mais même si l’existence est remplie de contrariétés et d’ennuis, le temps passe, les jours s’écoulent et tout prend fin. Il y avait trente-trois ans que Philémon Massé et Eileen Forrester étaient mariés lorsque la femme mourut. Le mari se trouva libéré. Certes, c’était un soulagement. Désormais, il n’aurait plus à endurer les traits empoisonnés qu’elle lui décochait continuellement mais c’était une mince satisfaction car sa vie était irrémédiablement gâchée. La défunte léguait sa part des biens de la communauté à son fils. Ce dernier fut informé du décès de sa mère, mais il télégraphia qu’il ne pouvait se rendre à Rochester pour les funérailles, sa femme étant gravement malade. Deux semaines après l’enterrement, le père lui adressait une lettre chargée renfermant la somme qui lui revenait comme héritage.

Environ un an plus tard, Frank Fagan, l’associé de Massé fut un matin trouvé mort dans son lit. Il avait succombé à une crise cardiaque. Ce fut là pour ce dernier un pénible et douloureux événement, car le défunt avait toujours été un ami sincère et un associé honnête et loyal. Les deux fils du mort, Will et Eddie, qui faisaient partie