sa figure dans l’encadrement de sa capuche. Elle reprend son travail. Elle sème ; elle plante.
Chaque fois que j’arrive, je trouve tante Eulalie à la besogne. Toujours coiffée de sa capuche, une vieille robe noire fanée et usée sur le dos, des bas de laine passés dans les mains, tante Eulalie agenouillée, la figure penchée vers le sol, creuse et fouille la terre.
Elle sème de la graine de melons, de concombres, d’oignons, de betteraves et de carottes. Elle plante un carré de tomates.
Tante Eulalie passe les journées dans son enclos.
Elle a fini de semer et de planter, mais chaque jour, je la retrouve dans son jardin.
Les graines ont germé, poussent, et je vois tante Eulalie envelopper dans des cornets de papier les tiges de ses melons pour les protéger contre les vers ; elle enfonce des bardeaux dans le sol pour défendre ses plants de tomates contre les ardeurs du soleil.
Ce manège se continue pendant des jours et des jours.
Maintenant, chaque après-midi, tante Eulalie, toujours vêtue de noir, sa capuche sur la tête, de vieux bas de laine dans les mains, se promène dans le potager avec un arrosoir. Inlassablement, elle arrose, elle arrose. Elle descend à la rivière et remonte le rude escalier de pierres avec sa chaudière verte pleine d’eau. Quotidiennement, elle arrose et arrose, pendant des heures.
De nouveau, voici tante Eulalie agenouillée dans ses carrés de melons, de concombres et d’oignons. Elle sarcle. La tête couverte de sa capuche, de ses mains gantées de vieux bas de laine, elle arrache les herbes qui poussent parmi ses légumes. Elle arrache les herbes ennemies qui essaient de croître en ses plates-bandes et de profiter de ses bons soins. Elle détruit ces parasites qui voudraient voler les sucs vivifiants du sol, profiter de la bonne fraîcheur de la terre. Tante Eulalie les arrache impitoyablement. Elle ne laisse que les bonnes plantes, que les herbes utiles. Même, elle émonde. Là où les carottes, les betteraves et les oignons sont trop drus, elle en arrache afin de laisser aux autres la chance de se développer rapidement.
Puis, elle se relève, reprend son arrosoir, descend chercher de l’eau à la rivière, et longuement, arrose, arrose.
Du matin au soir, tante Eulalie, peine et sue pour ses légumes.
Un dimanche matin, j’aperçois la forme noire de tante Eulalie plantée en son jardin, les deux bras levés vers le ciel. Tournée du