Aller au contenu

Page:Labiche - L’amour en sabots, 1861.djvu/9

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

PIGEONNIER.

Oui, je suis le notaire… et j’ai justement besoin d’une cuisinière… sais-tu écrire ?

LA BIRETTE.

Très-bien ! Papa était arpenteur !

PIGEONNIER.

Ça suffit, (À part.) Au besoin, j’en ferai un petit clerc ! (Haut.) Pourquoi as-tu quitté ton ancien maître ?

LA BIRETTE.

J’vas vous dire… j’étions en service avec un âne rouge…

PIGEONNIER.

Avec un âne rouge ?

LA BIRETTE.

Mais non ! un gars mal peigné, bête et lourd, qui ne m’a pas fait tant seulement un compliment dans toute l’année.

PIGEONNIER.

Ah ! bien… un rustaud…

LA BIRETTE.

Un pataud ! Nous n’étions jamais d’accord… Chez le fermier Grivet, où nous étions, on nous donnait à tous les repas des choux et du lard… et lui, il voulait toujours manger le lard, et me laisser les choux… Alors, comme je l’aime aussi le lard, nous nous tapions… J’avais queuquefois le dessus… et queuquefois le dessous… quand y me prenait en traître… ce qui fait que je m’ai dit : « V’là la loue… je file ; je ne veux pas moisir avec ce gars-là… » Et me v’là !

PIGEONNIER.

Et te v’là !…

LA BIRETTE.

Air nouveau de M. J. Nargeot.

Oui-da ! (bis.)
Me v’là !
C’est La Birette qu’on me nomme,
J’aurons vingt ans aux haricots ;
J’puis dir’que j’n’ai pas peur d’un homme,
Je tape dru… je mange gros.
Remerciant Dieu d’m’avoir fait naître,
Je n’engendre point le chagrin,
Et j’me vantions de mieux connaître
L’boulanger que le médecin.
Tout comme une autr’, les jours de fête,
J’aimions à danser… mais faut pas
Qu’un garçon vaniteux m’embête…
(Avec un geste de main.)
Ou ben j’te le r’mettions au pas.