Page:Labiche - Le Voyage de monsieur Perrichon, Gage, 1905.djvu/17

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Perrichon, distrait. — Et mes bagages qui sont resté là-bas sur une table… Je suis inquiet ! (Haut.) Ce bon Majorin ! c’est bien gentil à toi d’être venu !… (À part.) Si j’y allais !…

Marjorin. — J’ai un petit service à te demander.

Perrichon. — À moi ?

Marjorin. — J’ai déménagé et si tu voulais m’avancer un trimestre de mes appointements… six cents francs.

Perrichon. — Comment ! ici ?…

Marjorin. — Je crois t’avoir toujours rendu exactement l’argent que tu m’as prêté.

Perrichon. — Il ne s’agit pas de ça !

Marjorin. — Pardon ! je tiens à le constater… Je touche mon dividende des paquebots le huit du mois prochain ; j’ai douze actions… et si tu n’as pas confiance en moi, je te remettrai les titres en garantie.

Perrichon. — Allons donc ! es-tu bête !

Majorin, sèchement. — Merci !

Perrichon. — Pourquoi diable aussi viens-tu me demander ça au moment où je pars ?… j’ai pris juste l’argent nécessaire à mon voyage.

Marjorin. — Après ça, si ça te gêne… n’en parlons plus. Je m’adresserai à des usuriers qui me prendront cinq pour cent par ans… je n’en mourrai pas !

Perrichon, tirant son portefeuille. — Voyons, ne te fâche pas !… tiens, les voilà tes six cents francs, mais n’en parle pas à ma femme.

Majorin, prenant les billets. — Je comprends ! elle est si avare !

Perrichon. — Comment ! avare ?…

Marjorin. — Je veux dire qu’elle a de l’ordre !