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Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 10.djvu/208

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nous entendons le premier acte… le second acte… Papa ne dort pas ! Mes soupçons se changent en certitude. Au troisième acte, papa s’assombrit, il regarde à droite et à gauche comme s’il attendait quelqu’un qui ne vient pas ! Puis, tout à coup, sa figure s’illumine… il sourit à une loge voisine et il me donne un grand coup de coude… croyant te le donner à toi, maman !… Cinq minutes après, entre dans notre loge un jeune homme avec madame de Torcy… Voilà papa qui devient rouge, qui s’essuie le front, et qui se met à parler de Meyerbeer ! Ce monsieur se retourne vers moi en me disant : « Quelle grande œuvre que le Prophète, mademoiselle ! » Et enfin, maman me dit tout à l’heure : « Mets ton chapeau bleu ! » Ah ! pour le coup, c’était trop clair !

MADAME CHAMEROY.

Tiens ! tu es bien ma fille ! tu es d’une finesse.

CHAMEROY.

Qui m’épouvante !

HENRIETTE, riant et l’embrassant.

Cher petit papa ! c’est que tu n’es pas très-fin, toi ! Depuis un an, combien m’avez-vous montré de prétendus… incognito ?… quatorze !

CHAMEROY.

C’est vrai ! quatorze ! Je les ai inscrits sur mon carnet.

HENRIETTE.

Eh bien, il n’y en a pas un que je n’aie deviné.

CHAMEROY.

Qui te les a fait deviner ?

HENRIETTE.

Toi !