Page:Laboulaye & Guiffrey - La propriété littéraire au XVIIIe siècle, 1859.djvu/647

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Le dénoûment de la lutte engagée autour de la propriété littéraire pendant le cours du XVIIIe siècle eut lieu dans la séance de la Convention du 19 juillet 1793. Les inventeurs et les artistes avaient déjà obtenu la reconnaissance, mais la reconnaissance limitée de leur droit, dans la séance de l’Assemblée nationale du 30 décembre 1791[1]. Boufflers, chargé du rapport, y proclamait que toute invention nouvelle appartient à celui qui l’a conçue, qu’elle est sa propriété manifeste, incontestable. Puis, par une contradiction dont nous avons eu déjà des exemples, sur des conclusions qui n’étaient nullement en accord avec les prémisses, l’Assemblée s’empressa d’enlever à cette propriété si respectable le caractère essentiel de toute propriété, et la déclara temporaire. La même inconséquence se retrouve dans le rapport de Lakanal et dans le dé-

  1. Bulletin de l’Assemblée nationale.— Séance du 30 décembre 1791.— « ...M. Boufflers fait, au nom des comités d’agriculture et de commerce, un rapport concernant les inventeurs de nouvelles découvertes en tout genre d’industrie. Il présente un projet de décret qui est adopté en ces termes, après une légère discussion : «L’Assemblée nationale, considérant que toute idée nouvelle dont la manifestation ou le développement peut devenir utile à la société, appartient primitivement à celui qui l'a conçue, et que ce serait attaquer les droits de l’homme dans leur essence, que de ne pas regarder une découverte industrielle comme la propriété de son inventeur ; considérant en même temps combien le défaut d’une déclaration positive et authentique de cette vérité peut avoir contribué jusqu’à présent à décourager l’industrie française, en occasionnant l'émigration de plusieurs artistes distingués, et en faisant passer à l’étranger un grand nombre d’inventions nouvelles dont cet Empire aurait dû tirer les premiers avantages ; considérant enfin que tous les principes de justice, d’ordre public et d’intérêt national lui commandent impérieusement de fixer désormais l’opinion des citoyens français sur ce genre de propriété, par une loi qui la consacre et qui la protège, etc., a décrété et décréte ce qui suit : «Article 1er. Toute découverte ou nouvelle invention, dans tous les genres d’industrie, est la propriété de son auteur.... »