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Page:Laboulaye - Études sur la propriété littéraire en France et en Angleterre.djvu/38

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dépouiller le propriétaire ; ce sont des attentats visibles que la loi réprime chez tous les peuples civilisés.

En ce qui touche les fruits du sol, il faut considérer que la garantie de la loi cesse dès qu’on les a aliénés ; ce sont les produits de la propriété, mais ce n’est pas la propriété même ; elle reste entière après la récolte vendue, et, d’un autre côté, le propriétaire vend les fruits pour que l’acquéreur, quel qu’il soit, en dispose à son gré. On verra bientôt quelle est l’importance de cette remarque.

Voici donc la propriété sous sa forme la plus sensible, une valeur créée, un corps certain, un fonds qui ne se détruit point, quand on en détache les fruits. Trouvons-nous les mêmes caractères dans la propriété mobilière ? Oui. Prenons pour exemple une filature. C’est le travail qui a créé des métiers, des broches, des peignes ; ces machines sont un corps certain, toujours reconnaissable, et le produit de ces machines, le lin ou le coton, s’achète comme les fruits du sol. Le fond du droit est le même, la protection de la loi peut s’exercer de la même façon.

Au lieu d’une filature, supposons une fabrique de bronzes : ce sont des ustensiles ou des pendules que j’ai vendus. Ici se présente une difficulté qui fait sentir le besoin d’une protection particulière.

Lorsque je vends les fruits que j’ai cultivés, le coton que j’ai filé, ces fruits et ce coton sont destinés à la consommation, et ne peuvent servir qu’à la consommation. On fera du vin avec mon raisin, des toiles avec mon coton, mais on ne refera pas du raisin ou du coton à meilleur prix que le mien, en s’appropriant, sans peine et sans frais, ce qui m’a coûté un long travail et des capitaux considérables.

Il en est tout autrement d’un bronze. Pour fondre cette pendule, comme pour filer le coton, il a fallu de grands