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d’appliquer à la vie politique les règles de la vie religieuse pour constituer une démocratie pure ; et, ne l’oublions pas, les idées gouvernent le monde, et c’est toujours la croyance qui finit par l’emporter et par transformer la société et le gouvernement. Le passage de la religion aux affaires était si aisé, que les écrivains et les hommes d’action ne s’arrêtaient point sur cette pente. Ouvrez les traités de Milton, qui fut le grand pamphlétaire des puritains, vous y verrez qu’à chaque page, la république chrétienne mène à la démocratie politique ; rien ne vous fera mieux comprendre quel germe la persécution allait porter sur le sol américain.

La secte des brownistes, plus tranchée que les autres et surtout plus hostile à l’Eglise établie, appelait sur elle le dédain des beaux esprits[1] et l’effort de la persécution. On fit des lois particulières pour exagérer le châtiment : l’amende, la prison, la mort frappaient sans relâche ces indomptables adversaires. Brown, avec une légèreté et une faiblesse rares chez les fondateurs de secte, mais qu’on rencontre souvent chez les imaginations vives, Brown, qui avait résisté à la persécution et aux cachots, se lassa de l’exil et se réconcilia avec l’Église anglicane, jusqu’à en accepter un bénéfice. Il abandonna le Seigneur et

  1. Bacon et Shakspeare ont raillé les puritains avec une extrême amertume. Everett, Speeches and orations, t. II, p. 486.