Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 1.djvu/441

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On ne crée point de lois ; on ne crée point de constitutions. C’est une vérité qu’il ne faut pas se lasser de répéter, car elle renferme toute la politique et toute la science du législateur. Les lois ne sont que la consécration de rapports sociaux qui s’établissent d’eux-mêmes et par mille causes particulières ; ces rapports, la législation peut sans doute les modifier lentement, indirectement : mais croire qu’on les fait naître ou qu’on les supprime en un jour avec quelques lignes jetées sur le papier, c’est une folie qui serait ridicule si depuis un demi-siècle elle ne nous coûtait si cher !

Pour ne pas sortir du cercle d’idées que Locke poursuivait, croit-on qu’avec deux mots de loi on abolirait l’aristocratie anglaise ? La Révolution y échoua, et de nouveaux puritains supprimeraient demain la chambre des lords, qu’à moins d’échafauds et de confiscations, il faudrait compter comme aujourd’hui avec cette noblesse, qui est maîtresse du sol ; c’est là une force vive que l’on rencontrerait à chaque pas, et à laquelle, de façon ou d’autre, dans la commune ou dans l’État, il faudrait faire une part d’influence égale à celle qu’elle possède aujourd’hui.

Sans doute on peut, par de longs efforts, détruire l’aristocratie en lui ôtant la possession exclusive de ce sol, de cette richesse héréditaire qui fait sa puissance. Nos lois ont déraciné la noblesse ; non