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privilèges de l’aristocratie et du clergé, car la noblesse et l’Église d’Angleterre n’ont pas émigré dans le nouveau monde ; c’est en même temps un régime simple, naturel, d’une application facile, et qui se prête si bien à tous les besoins nationaux, qu’aujourd’hui, après deux siècles, il subsiste tout entier sous des noms peu différents. Dans ce système, rien d’imaginaire, rien de forcé, point de combinaisons étranges, point de castes, point de privilèges ; mais que de vérités politiques découvertes par l’expérience et déjà passées en maximes ! L’unité du pouvoir exécutif, l’institution d’un conseil qui contrôle et tempère le commandement, la division du pouvoir législatif, le droit égal de tous à la représentation ; combien de principes que nous entendons mal, et que Locke a méconnus !

Comprend-on maintenant pourquoi un gouvernement, produit naturel de la vie nationale, tel que celui de l’Angleterre ou de l’Amérique ; un gouvernement qu’on n’improvise pas, mais qui s’établit de soi-même, et se modifie peu à peu suivant les besoins et les idées, est infiniment supérieur à toutes ces formes abstraites qu’un législateur, ou qu’une assemblée impose aux nations ? Quand on est sans expérience, on s’imagine aisément qu’il serait beaucoup mieux qu’un Lycurgue inspiré, poussât le genre humain vers des destinées nouvelles. C’est l’erreur constante des utopistes, qui restent toujours jeunes. Mais les faits inexorables