Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 1.djvu/522

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ment le chef d’une compagnie de brigands devint chevalier banneret. Ce que nous nommons le préjugé nobiliaire, cet esprit d’exclusion, qui repousse un homme de talent par cela seul qu’il ne doit son illustration qu’à lui-même, qui marchande à Catinat le cordon bleu, à moins que le général ne fasse preuve de noblesse en se parjurant, cet esprit qui fut si fatal à la noblesse française, en conjurant l’opinion contre elle, a toujours été étranger aux lords d’Angleterre. Nous les avons vus accepter pour chefs des hommes sans aïeux ou de noblesse toute récente, Wellington, un Irlandais, Canning, fils d’une actrice, Brougham, un avocat, Robert Peel, le fils d’un filateur.

Cette façon libérale, éclairée, d’entendre le privilège, a fait de tout temps la gloire et la force de l’aristocratie anglaise ; en tout temps on est arrivé par l’Eglise, par l’Université, l’armée, le barreau, les charges municipales ; c’est la politique même qu’on suivait à Rome quand on admettait dans le sénat tout magistrat élu par le peuple, quand on donnait le droit de cité à tout allié latin qui, dans sa commune, avait rempli des fonctions municipales.

C’est ainsi que d’un ennemi on se faisait un ami, et une force d’un danger.

Faut-il s’étonner si cet arbre qui chaque jour va puiser dans le sol une sève nouvelle conserve toute sa majesté et toute sa grandeur ? Faut-il