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notable et qui depuis lors ne s’est point arrêtée ; c’est une conséquence forcée de l’immobilisation. Devant la formation de ces grands domaines, le petit propriétaire disparaît ; le fermier n’est plus qu’un entrepreneur d’industrie, qui dépend tout à fait du maître du sol ; le laboureur qui en France tend à devenir propriétaire, n’est de l’autre côté de la Manche qu’un mercenaire, comme l’ouvrier de manufactures ; la propriété qui chez nous émancipe l’homme des champs, là bas lui est inaccessible, et ce ne sont point quelques misérables économies de caisse d’épargne qui lui permettront jamais d’atteindre à ces domaines que chaque jour retire du commerce et substitue au profit de quelques familles qui grandissent. C’est ainsi qu’en dehors des villes toute l’influence est entre les mains d’un petit nombre de propriétaires fonciers.

Le progrès toujours croissant de l’industrie, la multiplication rapide de la fortune mobilière trompent sur le caractère dangereux de ce régime qui perdit la société romaine ; et il est juste de reconnaître que le péril n’est pas le même aujourd’hui. En temps de paix, sous un gouvernement libre et régulier, dans une société qui travaille, la propriété mobilière est sinon aussi durable, du moins aussi sûre que la propriété foncière ; la terre n’est plus qu’une richesse particulière dont le monopole n’empêche point la diffusion