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constitution qui pouvait le mieux convenir aux États-Unis. Ce n’était pas un esprit de grande portée ; mais s’il voyait les choses un peu terre à terre, il les voyait bien, et en outre il avait cet esprit de modération qui, en politique, est la vertu principale.

Lorsqu’après quatre mois de travail on vota cette constitution qui ne satisfaisait personne, et c’est peut-être pour cela qu’elle était excellente, Madison sentit qu’il fallait la défendre. On s’imagine aujourd’hui que cette constitution fut reçue avec acclamation : tout au contraire. On accusait les gens qui l’avaient faite d’être des usurpateurs de la souveraineté ; ils avaient trompé Washington, disait-on, et rêvaient l’établissement du despotisme à leur profit. Chez les patriotes les plus exaltés, il y eut une opposition violente contre cette œuvre qui devait être adoptée par le peuple. C’est que les hommes les plus considérables de la révolution, ceux qui avaient joué un rôle de 1763 à 1787, n’avaient pas du tout l’idée de cette consolidation du pouvoir. Ayant passé leur vie à lutter contre la métropole, il leur semblait que l’affaiblissement du pouvoir était la première condition de la liberté. Fanatiques de l’indépendance locale, ce nouveau système de gouvernement, qui faisait de l’Amérique un grand État et qui annulait les vieilles colonies, était quelque chose d’étrange pour eux, qui avaient vécu pendant tant d’années sous l’empire d’idées tout opposées.

La première façon de triompher de cette opposition, c’était la presse. C’était le peuple qui devait décider de la constitution, c’était au peuple qu’il fallait s’adres-