Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/277

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chacun leur système, et qui sont impitoyables pour qui ne pense pas exactement comme eux. Je ne parie pas de la différence qui séparait les Girondins des Jacobins, quoiqu’à vrai dire, plus j’ai voulu m’en rendre compte, moins j’ai pu voir en quoi elle consiste ; je ne puis pas prendre au sérieux cette accusation de fédéralisme inventée pour les faire guillotiner ; mais il m’est tout à fait impossible de voir ce qui politiquement sépare Danton de Robespierre, et je n’aperçois dans leurs sanglants démêlés autre chose que des haines furieuses et de basses jalousies. Ce ne sont pas des idées qui séparent ces hommes, ce sont des passions dont la France est l’enjeu.

Au contraire, voyez ce qui se passe en Amérique. La constitution ne satisfait personne. Hamilton, qui avait été le premier auteur de la réunion, déclare que nul dans la Convention n’est moins content que lui. Pour lui, la constitution est trop démocratique. Elle ne l’était pas assez pour Franklin. Washington doute qu’elle puisse réussir. Randolph vote contre. Personne ne croit au succès. Va-t-on se réunir pour renverser cet édifice vacillant au risque de perdre le pays en le livrant à l’anarchie ? Non. Tous ces hommes sont des patriotes habitués aux affaires. Leur idée à tous est la même : « Essayons de la constitution. À force de bon vouloir, nous en corrigerons les défauts. »

Grande leçon, messieurs, et qui nous apprend qu’il n’y a pas de constitution dont on ne puisse tirer la liberté, quand elle est mise en œuvre par des gens de cœur qui désirent avant tout le bien public. C’est là le