Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/62

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voquant ainsi dans la foule des manifestations en sens divers.

Ces interventions, destinées à contrecarrer la propagande adverse, devaient être fréquentes, aussi bien du côté païen que du côté chrétien. On ne s’expliquerait guère le ton rogue et méprisant des polémistes chrétiens à l’égard des philosophes de leur temps, les accusations graves qu’ils portent contre leurs inconséquences doctrinales et l’immoralité de leur vie, si leur mauvaise humeur n’avait été constamment avivée, ulcérée, par l’acharnement de ceux-ci à les rétorquer. — « Pourquoi, demande l’apologiste Tatien, pourquoi détestez-vous comme les derniers des scélérats ceux qui suivent la parole de Dieu ?… Pourquoi m’accuser quand je publie mes doctrines, et vous empresser de ruiner tout ce que je dis[1] ? »

Ce qui serait intéressant, ce serait de connaître les points autour desquels roulaient le plus souvent ces controverses orales. Nos renseignements à ce sujet sont malheureusement peu abondants. Nul doute que la doctrine de la résurrection n’ait largement défrayé ces polémiques. Celse reprochera aux chrétiens leur attitude dans de semblables débats : après qu’on les a pressés de toutes parts et confondus, ils reviennent aux mêmes affirmations, comme si elles n’étaient pas déjà réfutées, et en renouent sereinement la trame brisée[2]. Saint Justin cite un autre grief des intellectuels païens : « Les prétendus philosophes objectent que ce ne sont que des mots et des épouvantails, ce que nous disons du châtiment des méchants dans le feu éternel, et que nous voulons amener les hommes à la vertu par la

  1. Discours aux Grecs, § 25 et 26 (trad. A. Puech, p. 141).
  2. Celse, ap. Origène, C. Celse, VIII, 33, 1.