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ajoutés plus tard et n’offrent pas les mêmes garanties[1]. Il n’est donc pas surprenant que le nom de Crescens, si ce fut lui qui déclencha entre 163 et 167 les rigueurs de Junius Rusticus, le préfet de la Ville, n’y soit pas indiqué. La phrase de Tatien est d’un tour pour nous assez énigmatique. Notons toutefois qu’Eusèbe de Césarée[2] et saint Jérôme[3] y ont lu une affirmation de la responsabilité de Crescens.

Minucius Felix, qui selon les vraisemblances (encore contestées) écrivait dans les premières années du iiie siècle, remarque dans son Octavius que les philosophes rougissent ou ont peur d’entrer en conversation publique avec les intellectuels chrétiens : audire nos publice aut erubescetis aut timetis[4]. Il est possible que le médiocre succès de certaines conférences les ait incités à une prudente réserve. Mais cet état d’esprit paraît assez différent de celui qui était communément le leur au cours du second siècle, quand, payant de leur personne, ils jetaient leur éloquence et leur autorité dans ces ardentes discussions.

III

S’il est un écrivain du second siècle dont on aurait attendu quelques vues personnelles sur la secte chrétienne, c’est assurément Apulée. Son dilettantisme de sophiste à l’esprit agile et à la parole experte l’avait promené à travers

  1. Voy. Delehaye, Les Passions des Martyrs, Bruxelles, 1921, p. 120. — Le texte est dans Knopf-Krüger, Ausgew. Märtyrerakten, Tüb., 1929, p. 15 et s.
  2. Hist. Eccl., IV, 16.
  3. De Viris ill., 23.
  4. Oct., 31, 6.