Aller au contenu

Page:Lacasse - Une mine de souvenirs, 1920.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

enfants en particulier : ce grand méchant souffle à l’oreille de mon esprit qu’avec la hache de mon frère je pourrais faire mieux que lui.

Obéissant à ce mauvais conseil, je détruisis, en me servant de mes deux petits pieds comme d’une pelle, les fondations supposées indestructibles de l’abri futur. Que je me crus puissant alors ! Jetant un regard de satisfaction sur les ruines colossales qu’un simple coup de pied avait accumulées, j’eus le tort de me complaire dans une joie secrète bien vive. Napoléon, après la bataille d’Austerlitz, a dû en éprouver une semblable. Dans tous les cas, les deux se valent pour le bonheur des deux individus. Les gloires humaines de cette espèce ne sont pas un reflet de la gloire céleste et passent comme une ombre.

La gloire humaine
Est une ombre vaine
 Qui fuit
L’âme mondaine
À perdre haleine
 La suit.

Mais à cinq ans on ne fait pas de telles réflexions. D’ailleurs je n’en eus pas le temps ; mon frère arriva tenant en mains son chapeau de paille dorée, rempli de sable. Je pris le parti de me sauver en saisissant sa petite hache. Le combat s’engagea. Je me défendis avec le taillant de la

29