Page:Lacaussade - Poésies, t1, 1896.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


L’un cherche dans le cloître et l’autre dans l’étude
Ce repos qui du cœur des vivants est banni ;
Mais, volupté, pouvoir, richesse, solitude,
Rien ne peut nous guérir du mal de l’Infini.

Pour l’assoupir en nous la prodigue Nature
De ses multiples dons nous offre le secours.
Selon nos appétits variant la pâture,
Elle occupe et distrait pour nous l’ennui des jours.

Et toi-même, ô poète ! au plus fort de la lutte,
Pour éprouver ces dons vides et mensongers,
N’as tu pas eu ton jour, ton heure, ta minute ?
Ne te plains pas : j’en sais de moins bien partagés.

Ceux-là dans leur obscur et dur pèlerinage,
Sans trouver l’oasis au désert ont erré ;
Ils ont marché sans halte et dès le premier âge :
Rude fut le chemin à leurs pas mesuré.

Ceux-là n’ont rencontré sous l’astre qui flamboie
Ni le puits du pasteur, ni l’ombre du palmier.
Tout leur fut refusé ! — Seule et suprême joie,
Ils sont morts dans leur culte et leur rêve premier.

Toi, du moins, tu connus dans la mêlée austère,
A l’heure noire où tout nous semble sans pitié,
Les deux biens les plus grands qui soient sur cette terre :
La sainte poésie et la sainte amitié !