Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/117

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Écho, juge et témoin des douleurs de la terre,
Le poète a le droit d’absoudre ou de punir !
Ce qu’il chante, il l’a vu ! C’est par sa bouche austère
Que le siècle présent parle au siècle à venir !

A nos vices drapés, il arracha leur voile.
Il n’a rien dit de faux ! il n’a rien fait d’impur !
Sa muse, blanche sœur de la plus blanche étoile,
Peut lever devant tous un front superbe et sûr !
Il ne vendit jamais, dans une lâche ivresse,
Au Mal riche et puissant un hommage odieux ;
Mais, disciple inspiré du Sage de la Grèce,
Sur leur pourpre usurpée il conspua vos dieux !

Non ! non ! il n’ira point ramper sous votre culte,
Brûler sur vos autels un idolâtre encens !
Pour ces dieux imposteurs à qui sa verve insulte,
Sa lèvre aura toujours d’implacables accents !
N’attendez pas de lui qu’il change de langage !
Sans cesse il flétrira ce qu’ont flétri ses vers :
Il maudissait hier vos dieux et l’esclavage,
Il maudira demain et vos dieux et vos fers !

Mais si d’un vers ardent qui parfois se déchaîne
Il a d’un joug cruel flétri l’iniquité,
Son cœur a plus d’amour que vos cœurs n’ont de haine :
Le saint oubli des maux, ses lèvres l’ont chanté !
Aux pieds d’un Dieu de paix il convia les âmes ;
Lui-même il y brûla pour encens ses douleurs ;