Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


XXIX


 
A ce cœur altéré d’amour et de lumière,
O Dieu ! pourquoi n’offrir qu’un pain trempé de fiel ?
Que ne l’as-tu fait naître en quelque humble chaumière
Sur la haute montagne où l’on est près du ciel !
Que ne lui donnas-tu, loin de la multitude,
Avec un toit à l’ombre où cacher ses amours,
Une Ève, âme des bois et de la solitude,
Illuminant sa vie, édénisant ses jours !

Depuis l’heure où, la nuit ayant plié ses voiles,
L’abeille est dans la brise et l’aube est sur les monts,
Jusqu’à l’heure où là-haut éclosent les étoiles,
Chastes fleurs dont le ciel parsème ses vallons,
Loin du monde, abrité comme en un nid fidèle,
Sous le modeste sort, don béni de tes mains,
Il eût vécu sa vie à l’ombre de ton aile,
Dans l’amour d’un seul être et l’oubli des humains.