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Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/122

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Pour s’approcher de l’astre aux longs baisers de flamme,
La Terre, au rythme lent d’un vague épithalame,
Dévoilant ses beautés dans le bleu firmament,
Semblait se soulever vers son céleste amant.
Et la mer s’éveillant et montant de l’abîme,
Donnant à chaque houle une clameur sublime,
Par les cent mille voix de son orgue éternel
Saluait du soleil le retour solennel.
Et mon âme, ivre aussi de sève et de lumière,
Dans l’hymne universel confondant sa prière,
Pour exhaler vers Dieu son filial encens,
Au verbe du poète empruntait ses accents.

Je t’aimais, ô Nature ! et baignés de tes gloires,
Mes yeux se complaisaient dans ta vaste beauté ;
Sur l’homme aux courts destins contemplant tes victoires,
J’oubliais sa misère et ta fragilité.
Avant le soir, hélas ! s’éteint notre prunelle ;
Le temps accorde une heure à notre œuvre charnelle,
Mais le temps ne peut rien sur ta grâce éternelle,
Et d’un souffle sans fin ton sein est animé.
Dans l’auguste concert de tes voix unanimes,
Apaisant de mes maux les révoltes intimes,
D’oubli tu m’abreuvas et de rêves sublimes :
Tu consolais l’enfant que toi seule a aimé.


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