Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/145

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Et la belle-de-nuit, frêle et mystérieuse,
S’ouvrait aux blancs reflets de ta clarté rêveuse.
Comme elle je sentais mon cœur s’épanouir,
Et les troubles secrets en moi s’évanouir.
Et sous ton disque pur dont le jour la captive,
Et seule à mes côtés, la muse moins craintive
A la brise des soirs abandonnait ses vers
Que semblait écouter le silence des airs.

Et cette nuit, sur l’onde où ma nef est bercée,
Je m’abandonne encore à ma vague pensée
En te voyant flotter sous le ciel vaste et pur,
Comme un navire aussi dans une mer d’azur.
Qu’il est doux de rêver à tes muettes flammes
Qui viennent près de moi se jouer dans les lames !
Tu sembles effleurer d’un vol mystérieux
Le flot calme et sans fond de l’océan des cieux ;
Et le rayon qui pleut de ton globe nocturne
Vient baigner ma paupière et mon front taciturne.

Bel astre, n’es-tu pas le fortuné séjour
Des vivants dont les yeux se sont fermés au jour,
L’asile aérien, la flottante demeure
De ceux qui sont partis et qu’ici-bas l’on pleure ?
Peut-être que l’un d’eux, en ce même moment
Où mon œil te contemple au fond du firmament,
Suit des claires hauteurs de ta paisible sphère
Notre globe natal, notre Éden, notre terre,
Dont l’orbe voyageur, dans l’éther emporté,