Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/150

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Sœur, à mon amitié tu fus toujours fidèle,
Femme, tu vins à moi quand je fus délaissé,
Ange, tu m’abritas à l’ombre de ton aile :
À me plaindre ton cœur ne s’est jamais lassé.
Ô fleur de ma vallée, o mon lys solitaire,
Je puis songer du moins qu’il est sur cette terre
Une âme riche encor de tendresse et de foi !
De mon lac trouble ou bleu reste à jamais le cygne,
Toi, la plus dévouée autant que la plus digne
Du haut et saint amour dont j’ai vécu par toi !

Que l’Orgueil me condamne et de mon sort m’accuse,
Que l’Envie au teint vert s’acharne sur mes pas,
Qu’ils raillent en secret mon culte pour la Muse,
Ils pourront me briser, ils ne me ploieront pas !
Partout de les braver la joie en moi fermente ;
Mon âme se dilate au vent de la tourmente,
Et j’aime à voir bondir les flots autour de moi !
Bercé par les assauts de la vague orageuse,
Je laisse en paix flotter ma barque aventureuse,
Insoucieux de l’onde et ne songeant qu’à toi.

Que si, la force un jour trahissant le courage,
Je m’affaissais vaincu sous le flot triomphant,
Mais insoumis toujours, et défiant l’orage
D’un cœur silencieux que sa fierté défend ;
En cet instant suprême et roulant vers la tombe,
Ma lèvre déjà froide, ô ma blanche colombe,