Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/225

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La plaine est transformée, on a coupé nos bois ;
Je ne reconnais plus mes arbres d’autrefois ;
Le filao soupire où souriait la rose ;
Mes yeux cherchent en vain notre enclos de jam-rose ;
Ils ont disparu tous, et partout sur mes pas
S’offrent des champs nouveaux que je ne connais pas.
Là-bas, d’autres sentiers sillonnent nos prairies.
Nos beaux gérofliers, pyramides fleuries,
Balançant de leurs fruits les grappes de corail,
Nos lataniers dans l’air s’ouvrant en éventail,
Et des hauts cocotiers la mouvante avenue,
Tous ces arbres dotés d’une grâce inconnue,
Pleins de brise et d’oiseaux et d’harmonieux bruit,
On a tout renversé, tout coupé, tout détruit,
Tout, jusqu’au vert enclos à la haie odorante,
Où notre sœur, enfant vive, rieuse, errante,
Poursuivait le matin dans les herbes en pleurs
Les papillons posés sur la coupe des fleurs.



Champs et murs et jardins, tout a changé de face.
Avant nos souvenirs notre passé s’efface.
Des choses d’ici-bas triste instabilité !
Nos rêves ont encor moins de fragilité.
Voyez ! ma maison même, autrefois si petite,