Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/232

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Dans les brises flottant sur leurs larges sabords,
Respiraient enivrés le généreux arôme
Du travail de la terre et du travail de l’homme !



Mais pourquoi réveiller ces souvenirs charmants,
Tableaux évanouis dans le passé dormants ?
Le matinal éclat de leur frais paysage
Répand un jour trop gai sur mon pâle visage ;
Leur lumière est trop vive, elle blesse des yeux
Faits au ciel terne et froid d’un présent pluvieux.
Et puis le cœur me saigne ! et puis, sur cette terre,
Je me sens désormais si triste et solitaire !
De chaque objet connu que j’effleure ou je vois
Il semble qu’aussitôt il s’élève une voix,
Qui, m’évoquant dans l’âme une image trop chère,
Me dit tout bas : « Poète, où donc est votre frère ?… »

Mon frère ? il est parti ! Je suis seul désormais.
Il ne m’est rien resté de tout ce que j’aimais.
Le Seigneur m’a repris l’ami de mon bel âge.
Mon frère ? il est parti pour ce lointain voyage
D’où l’on ne revient plus ! Au val du latanier,
Moi qui l’ai précédé, je reste le dernier.
Notre sœur, douce enfant, nous quitta la première ;