Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/231

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Où, butinante et blonde et de sucs altérée,
Une abeille vibrait de lumière enivrée !



Ainsi tout respirait, tout vivait, tout chantait :
Un astre plein de vie à l’horizon montait ;
Du ciel l’oiseau des mers traversait l’étendue ;
Comme une fleur de pourpre aux bambous suspendue,
Le cardinal de feu flamboyait au soleil ;
Et nous, de chaque chose écoutant le réveil,
Respirant du matin la fraîcheur douce et saine,
Enfants, nous parcourions cette ondoyante scène,
Vifs, joyeux, tout trempés de rosée et d’odeur,
Jusqu’aux lieux où déjà cent Noirs, beaux de vigueur,
Travaillaient et chantaient pour alléger leur tâche.
Les cannes par milliers s’abattaient sous la hache ;
Des champs entiers tombaient, et, sur le sol roulés,
Gisaient les blonds roseaux en tas amoncelés ;
Et l’on voyait au loin fumer la sucrerie,
Et, comme un long ruban de blanche draperie,
L’odorante vapeur se perdait dans les airs,
Et le vent, en passant, l’emportait sur les mers,
Avec le chant des bois et le parfum des plaines ;
Et les marins, lassés de leurs courses lointaines,
De l’Inde ou de l’Europe arrivant sur nos bords,