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LXV

VEUX-TU FUIR ?


 
Loin d’ici veux-tu fuir ? pauvre couple enchaîné,
Veux-tu nous envoler vers l’île où je suis né ?
Je suis las de contrainte et de ruse et d’entrave.
Le ciel ne m’a point fait avec un cœur d’esclave !
Me cacher pour te voir, pour t’aimer, ô tourment !
Je veux vivre en plein air et t’aimer librement !
Ce monde est faux et lâche, et ses hypocrisies
M’allument dans le sang de sourdes frénésies.
J’étouffe ici ! je meurs ! je suis las de souffrir !
Je veux vivre et t’aimer librement ou mourir !
Et puis, ton ciel est froid, il m’attriste, il m’obsède.
Moi, né sous le soleil, j’aime un azur plus tiède,
Des horizons baignés de brise et de splendeur,
De fiers sommets empreints de sauvage grandeur,
Des flots lointains et bleus où blanchissent des voiles,
Des jours resplendissants, des nuits où les étoiles
Ouvrent dans l’air lacté leurs lumineux réseaux :
Telles des perles d’or tremblent au fond des eaux.