Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/282

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Qu’un invincible instinct porte en haut ; fils des aigles,
De la Liberté seule ils reçoivent des règles.
L’air d’ici-bas les tue ; il faut à leurs poumons
L’atmosphère sereine où plongent les grands monts ;
Libres comme la mer, les airs, les cieux sublimes,
De l’idéal humain ils habitent les cimes ;
Aimants autant que fiers, la sainte Humanité
Dans leur poitrine ardente a toujours palpité ;
Et, quel que soit le sort, ou fatal ou prospère,
Ils l’invoquent debout : Dieu pour eux n’est qu’un père !
Plutôt que l’esclavage acceptant le trépas,
On les brise, on les tue, on ne les courbe pas !
Ils aiment le génie et ces fronts ceints d’épines
Expiant sur la croix leurs chimères divines ;
Et, devant les bourreaux de sang rassasiés,
Ils proclament divins ces grands suppliciés !
Souvent alors, souvent ivre et folle de rage,
La foule en les frappant croit punir un outrage ;
Ils tombent, et la mort, dans leur cœur indompté,
Ne lit qu’un mot gravé, — ton nom, ô Liberté !…
Ces cygnes de haut vol, ces sereines figures,
Quand s’ouvrent dans les airs leurs blanches envergures,
Sont d’en bas salués de haineuses clameurs ;
Des fétides marais le peuple entre en rumeurs,
L’oiseau des basses-cours, la volatile immonde,
D’instinct maudit en eux les insoumis du monde.
Insultez !… je comprends vos cris injurieux :
Ceux-là ne servent point de vautours aux faux dieux !