Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/293

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Et ces vers douloureux, cette amère liqueur,
Goutte à goutte, en secret, s’épanchant de mon cœur,
Me font plus douce encor la douce poésie
Dont s’abreuvait, enfant, ma jeune fantaisie.
Et je songe avec pleurs à mon enfance aux bois,
A ma lyre facile, à mes chants d’autrefois,
A ces jours où, pareils au lys de ma colline,
Essaim mélodieux à la voix cristalline,
Mes frais pensers, ouvrant leurs ailes de blancheur,
D’un naturel essor s’en allaient au Seigneur !
Et je me dis alors, pris du mal de la vie,
Et vers mes jours éteints tournant des yeux d’envie :
Pour croire et pour aimer, pour prier et chanter,
Pour se sentir vers Dieu palpiter et monter,
Pour déborder de foi, de sève et de puissance,
Pour revêtir d’Abel la robe d’innocence,
Pour être fort et pur, candide et triomphant,
Ah ! qui donc ne voudrait redevenir enfant !