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Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/35

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Quand les neiges de l’âge ont blanchi nos cheveux,
De labeurs harassé, battus des flots contraires,
Nous sombrons sous l’espoir qui vit sombrer nos frères ;
Et nous sentons alors, dans l’angoisse du cœur,
Qu’on a tout délaissé pour un songe menteur,
Songe qu’à son réveil la raison nous enlève.
Hors l’amour des enfants, tout est mensonge et rêve !
Tu le sauras un jour… Mais va cueillir ailleurs
Ton lot d’illusions, d’épines et de fleurs.
Je ne dois point flétrir tes espoirs éphémères,
Car le bonheur, ami, n’est fait que de chimères.
Pour moi, je veux rester à l’ombre de ces bois
Où joua ton enfance, où s’inspira ta voix.
Triste de tes revers, de ton bonheur heureuse,
Je suivrai du regard ta course aventureuse,
Et je prierai le ciel de mesurer les vents
A l’esquif que conduit ta voile aux plis mouvants.
Mais, quel que soit le sort qui t’attend dans la lutte,
La palme ou le cyprès, le triomphe ou la chute,
Souviens-toi qu’en ce monde il est du moins un cœur
Qui t’aimera vaincu tout autant que vainqueur,
Et, contre tous les coups d’une fortune amère,
Que toujours, mon enfant ! il te reste ta mère !