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Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/60

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poèmes et paysages

Balancent aujourd’hui leurs rameaux étrangers,
Et font au voyageur brisé de lassitude
Une tiède oasis de cette solitude.

Aux veines du rocher qui filtre ses cristaux,
Recueillant avec soin le blanc filet des eaux,
Le lit creusé par vous pour l’onde éparse et pure
Vous porte sa fraîcheur et son vivant murmure ;
Et l’oiseau, que son bruit avertit en passant,
S’abreuve et dans les airs monte en vous bénissant.
Sa faim glane après vous dans votre champ prospère
Les grains qu’y laisse exprès votre bonté de père ;
Il vous aime, il vous chante, et les grands vents surpris
S’étonnent sur ces monts de bercer des épis.
Cependant sous leurs fruits dont le poids les incline
Vos arbres inégaux penchent sur la colline,
Où la pêche de pourpre au duvet velouté
Rougit comme la joue en fleur de la beauté.
Mais des champs paternels qu’habita votre enfance
Votre cœur a gardé la longue souvenance ;
Et plein des beaux soleils de vos premiers beaux ans,
Respirant le passé dans les parfums présents,
Vous prodiguez vos soins à ces tiges légères,
Fleurs d’un autre climat et pour nous étrangères.
Sur le cours diligent des rapides ruisseaux
Vos odorants lilas suspendent leurs berceaux,
Et sous les framboisiers la brune violette,
Comme vous simple et douce et comme vous discrète,
Verse dans vos gazons sa timide senteur…